Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

art de vivre - Page 24

  • Gastronomie déconfinée: le chevreau de mai aux herbes fines

    chevreau.jpg

     

     

    Vers les ides de mai, lorsque j’étais minot

    Mon père achetait, chaque année, un chevreau.

    Attaché dans la cour en attendant la fête,

    Qu’il soit noir, blanc ou brun, il l’appelait « Blanquette ».

    Nous, nous le caressions, lui donnions à manger

    Epluchures, salades, déchets du potager,

    Et le bestiau bêlait, pleurait à fendre l’âme

    Comme s’il devinait son destin sous la lame.

    Puis un soir arrivait, perché sur son vélo,

    Armé de ses couteaux, le terrible Angelo !

    Casquette de côté, poilu, rouquin et borgne

    C’était un Espagnol venu de Catalogne.

    Le père maitrisait le chevreau sur le banc,

    Mon frère et moi tenions les pattes en tremblant

    Et le chevreau criait, soufflait comme une forge

    Tandis que le tueur, sûr, lui tranchait la gorge.

    Quelques brefs soubresauts de la pauvre bestiole

    Marquaient les derniers pas d’une vie qui s’envole.

    Puis, s’essuyant les mains, le terrible Angelo

    Sortait de son carnier la valve de vélo.

    Alors, perçant la peau du chevreau sur le râble,

    Il y introduisait l’accessoire cyclable,

    Mon père, puis, avec la pompe à bicyclette

    Gonflait, gonflait, gonflait, gonflait la bête.

    La peau se décollait. On pendait le bestiau

    On espuyait la peau, on sortait les boyaux…

     

    Souvenirs, nostalgie…Allez ! A la cuisine !

    La chevrette, au printemps, sera viande divine.

    Sur la plaque du four, mettez les deux cuissots

    A dorer vingt minutes sur de l’huile des Baux.

    Dans une casserole, fondez du lard fumé

    Avec des échalotes et de l’ail écrasé,

    Ajoutez du vin blanc, plutôt sec, un demi,

    Lorsque tout cela bout, ajoutez thym, persil,

    Basilic, coriandre, ciboulette, estragon

    Mijotez dix minutes, et buvez un gorgeon.

    Sortez le plat du four, salez, poivrez la viande,

    Arrosez-là avec la sauce précédente,

    Puis remettez au four pour cinquante minutes

    Cent-quatre-vingt, pas plus. Vous touchez presque au but.

    Arrosez très souvent, que la viande s’imprègne.

    Attention toutefois, il faut pas que ça baigne.

    Découpez, saupoudrez des herbes qui vous restent,

    Citronnez puis servez sans faire le modeste !

    Cessons pour aujourd’hui ce conte culinaire

    Ma tripe est assoiffée, remplis ras bord mon verre

    De ces nectars divins de la Coste-du-Rhône

    Et laisse près de moi la coupe et la bonbonne !

     

    Les ingrédients pour huit personnes :

    Les deux gigots d’un chevreau, - quatre cuillère à soupe d’huile d’olive (des Baux…ou d’ailleurs), - deux hectos de lard gras-, maigre fumé, - une bouteille de vin blanc sec (1/2 litre pour le chevreau, le reste pour le cuistot), - cinq échalotes, - cinq gousses d’ail, - une grosse poignée de persil haché, - autant de coriandre haché, - un bouquet de basilic, - ciboulette, - estragon, - thym émietté, - sel, poivre du moulin, - un citron. En accompagnement le chevreau accepte tout : haricots blancs, pommes de terre sarladaise, petit épeautre de Sault ou polenta.

     

    Quand aux vins pour sublimer les saveurs de ce met délicat, il les faut plutôt légers, printaniers : les vins rouges de l’année, un « vin qui a fait ses Pâques », ayant six mois de bouteille. Vins de Loire, d’Anjou, Côtes-du-Ventoux, Coteaux-d’Aix par exemple.

     

    Photo X - Droits réservés

  • Avignon sans son Festival… Masquée et « emmasquée ».

    avignon place de l'horloge confinée.jpg

    La place de l'Horloge VIDE !

     

     

    - Alors Loulle, tu déconfines ?

    - Tu sais Victor, nous, les mastroquets, nous sommes habitués à être confinés dans notre rade. Pour vous apporter de la joie, de la convivialité, voire du réconfort lorsque vous avez le tracsir. Mais on est fermé depuis deux mois… Voilà pourquoi vous me manquez, toi, Bert, Ali, Jeannot, Nadia-carte-bleue, la grande Jeannine et même les jeunes glandeurs qui passent leur temps derrière l’écran timbre-poste de leur étrange machine…

    - La ville n’est plus la même Loulle. Les rues sont quasi vides malgré la levée partielle et peut-être provisoire de l’assignation à résidence. Et puis, tiens regarde-les les survivants de la covid, regarde-les marcher avec leur muselière, évitant soigneusement l’autre, ne parlant que par onomatopées incompréhensibles sous leur barrière textile. C’est la burka pour tout le monde.

    - Et puis cette année Victor, oualou pour le Festival… Coronaviré le Festival. Interdits de séjour les artistes et les festivaliers…

    - Eh ouais Loulle. Cette année, Avignon ne sera pas cette somptueuse salope, alanguie au bord du Rhône et cambrée sous les caresses du mistral, qui s’ouvre et qui s’offre pour son grand rut de l’été. Abstinence cette année. On ne verra pas, comme chaque année, à l’intérieur du collier de pierres blondes des remparts une foule cosmopolite et bigarrée d’artistes et de touristes, d’intellos et de clodos, de saltimbanques et de rêveurs, de poètes et de voleurs, tous attirés comme les éphémères par la flamme vers cette scène planétaire de l’illusion théâtrale, ce grand marché du rêve.

    - Nostalgie Victor… D’habitude, près de note rade, ou chez Tony, place de l’Horloge, c’est un tourbillon de couleurs et de bruits, un forum grec où la cité festivalière joue, chante, danse, boit à longs gorgeons des nectars anisés odorants et capiteux sous l’ombre bruissante des platanes aux larges poitrails. Ici, les monuments, les livrées et les tours semblent fumer sous la tremblante réverbération des murs gorgés de lumière.

    - Ouais… Cette année il n’y aura que les cigales qui auront soif à force de déclamer leur staccato d’amour dans les toisons vertes des grands platanes. Enfin, de ceux qui restent parce que la plupart tombe sous les tronçonneuses. Parait qu’ils ont le chancre. Mais enfin, Loulle, soyons francs, les Avignonnais ont une approche contradictoire de leur festival. Lorsqu’ils sont à l’extérieur de leur ville, ils ne tarissent pas d’éloge sur lui. Et à les entendre pérorer, tous ont bu le pastis avec Jean Vilar, joué aux boules avec Gérard Philippe où mangé l’aïoli avec Jean-Pierre Darras. Ils sont fiers de ce monument virtuel même si beaucoup n’y mettent jamais les pieds. Mais pourtant, lorsque juillet annonce le grand chambardement, les Avignonnais, en masse, fuient leur ville chérie, l’abandonnant pour une lune entière aux hordes lutéciennes et franchimanes, outre-quiévrines et bataves, albioniennes et tudesques, helvètes et transalpines, ibères et lusitaniennes, africaines et orientales, américaines et nipponnes. Ils retrouveront plus tard leur ville, cette somptueuse salope comblée, apaisée et fécondée par les semences mêlées de ses milliers d’amoureux de l’été.

    - Eh bien cette année, Victor, on est emmasqué.

    - « Emmasquée », c’est un beau néologisme Loulle. En provençal, les « masq », ce sont les sorcières. Être « emmasquée » c’est être sous le coup d’un sort. Alors cette année notre belle salope, avec ce coquin de sort de coronavirus, elle restera chaste, et masquée…

    - Ce qui ne nous empêchera pas de boire un coup. À la nôtre !


    Photo Michel Benoit

     

  • Ouiquinde érotique déconfiné avec cette fine lame de Ronsard !

    Il n'allait pas voir que la rose notre Pierrot national,

    prince des poètes et poète des princes !

     

    coeur fleur 2.jpg

     

     

    Lance au bout d'or, qui sais poindre et oindre,

    De qui jamais la roideur ne défaut,

    Quand, en camp clos, bras à bras, il me faut

    Toutes les nuits au doux combat me joindre ;

     

    Lance, vraiment, qui ne fus jamais moindre

    A ton dernier qu'à ton premier assaut,

    De qui le bout, bravement dressé haut,

    Est toujours près de choquer et de pondre !

     

    Sans toi le Monde un Chaos se feroit

    Nature manque inhabile seroit,

    Sans tes combats, d'accomplir ses offices ;

     

    Donc si tu es l'instrument du bonheur

    Par qui l'on vit, combien à ton honneur

    Doit-on de vœux combien de sacrifices ?

     

     

    Je te salue, ô merveillette fente,

    Qui vivement entre ces flancs reluis ;

    Je te salue, ô bienheureux pertuis,

    Qui rend ma vie heureusement contente !

     

    C'est toi qui fais que plus ne me tourmente

    L'archer volant qui causait mes ennuis ;

    T'ayant tenu seulement quatre nuits,

    Je sens sa force en moi déjà plus lente.

     

    Ô petit trou, trou mignard, trou velu,

    D'un poil follet mollement crespelu,

    Qui, à ton gré dompte les plus rebelles :

     

    Tous verts galants devraient, pour t'honorer,

    A beaux genoux te venir adorer,

    Tenant au poing leurs flambantes chandelles !

     

     

    bouche-chatte.jpg

     

    Adieu, cons rondelets, corralines fossettes,

    L'entretien de Nature et de tout l'Univers ;

    Adieu antres velus, plains de plaisirs divers,

    Fontaines de nectar, marbrines motelettes.

     

    Ores, en votre lieu sont les fesses molettes,

    Et les culs blancs de chair, de tout poils découverts ;

    Les culs plus que les cons sont maintenant ouverts :

    Les mignons de la cour y mettent leurs lancettes.

     

    Le Roi ne m'aime point, pour être trop barbu ;

    Il aime ensemencer le champ qui n'est herbu,

    Et, comme vrai Castor, chevaucher le derrière ;

     

    Lors qu'il foute les culs, qui sont cons estrecis ;

    Il tient le naturel de ceux de Médicis,

    En prenant le devant, il imite son père !

    mignon2.jpg

     

    Illustrations X - Droits réservés