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Connaissez-vous le Salon de l’évasion fiscale ?

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Il s’en passe de belle dans notre hexagone.

Bien sûr, la révolte des « sans-dents », de la « France d’en-bas » qui vêtue de jaune – la couleur des cocus - manifeste depuis ce ouiquinde contre des taxations excessives.

Mais il s’en passe d’autres : une semaine avant, ils ont été précédés dans leur lutte contre les impôts par d’autres redoutables révolutionnaires : savez-vous que les vendredi 9 et samedi 10 novembre s’est tenu discrètement un véritable « salon de l’évasion fiscale » ? Pas n’importe où : à Cannes, dans les salons du palace Le Martinez, propriété du Qatar. Eh ! Ils n’ont pas appelé ça comme je viens de vous l’écrire mais International Emigration & Luxury Property (IELP) soit « Salon de l’émigration et de la propriété de luxe ».

Comment ? Chercher des propriétés luxueuses pour des émigrés ? Ben oui ! En fait, il s’agit d' « émigrés » désirant obtenir une nouvelle nationalité par l’investissement ou pour mettre leur patrimoine à l’abri. Vous voulez devenir Chypriote ? Facile, il suffit d’investir au moins deux millions d’euros dans l’immobilier local. Si vous êtes un peu gêné, vous pouvez demander la nationalité de Malte, pour seulement 650 000 euros d’investissement dans l’immobilier maltais. Si vous êtes radin, vous pouvez toujours demander la nationalité portugaise, autour de 500 000 euros et même la moitié si vous investissez dans un bien de plus de 25 années.

Environ 90 pays proposent ainsi des passeports ou "visas dorés", dont plusieurs de l’Union européenne, comme Chypre, le Portugal ou Malte, ou encore des juridictions comme les Bahamas ou les Émirats Arabes Unis, selon l’OCDE qui s’est inquiété que cela puisse servir à blanchir de l’argent ou frauder le fisc.

Voilà ce qui était au centre des « travaux » de cet étrange salon. En fait, il s’agissait d’un grand raout international pour les schémas d’optimisation fiscale et vente de nationalités dans les paradis fiscaux. Il s’est déjà tenu à Cannes l’an passé dans la plus grande discrétion publique.

Eh ! Ce n’était pas la fête de l’Huma ! Pas de stand merguez, que du caviar. Faut dire que c'était sur invitation et que le droit d’entrée était de mille euros. Plus 500 euros pour la soirée de gala. Bof, un pourboire pour ce public ciblé, environ 60 entreprises de trente pays et 500 visiteurs. Parmi ces « happy few », on notait la présence de banques privées, de consultants financiers, de promoteurs d’immobilier de luxe et de cabinets de juristes et d’immigration.

Ils proposent un pack pour échapper à la fiscalité et à la justice, sachant que le salon ne s’adresse pas qu’à des gens qui se sont enrichis en toute légalité !

Les participants ont ainsi pu s’instruire sur « la déclaration de revenus et de patrimoine dans l’Union européenne, aux États-Unis, au Canada, en Grande-Bretagne et d’autres pays développés », comment y enregistrer une société, y ouvrir un compte, ou se renseigner en matière d’optimisation fiscale.

Il est vrai que s’il y a de plus en plus de pauvres, c’est parce qu’il y a de plus en plus de très riches ! Alors, l’augmentation du nombre de très grosses fortunes est convoitée par un nombre croissant de services et de programmes encourageant l’expatriation. L’organisateur délocalise ensuite le salon à Kiev, Moscou, Bombay et Shenzhen, avan ! t une étape réservée à l’immobilier très haut de gamme à Monaco.

Vous aussi, ne laissez pas vos éconocroques sur le livret A ou sur une assurance vie famélique, optimisez, OPTIMISEZ ! Comment faire ? Simple, vous tapez sur Qwant (comme moi) ou sur votre moteur de recherche, et vous demandez « Cabinets conseil en optimisation fiscale » et vous aurez une profusion de rémoras prêts à vous servir de poisson pilote dans cet univers de requins sans scrupule.

L’évasion fiscale est un acte félon pour le citoyen, c’est un crime de lèse vivre ensemble, une outrance à la première des dignités collectives : la volonté partagée de nous construire un destin commun, de nous élever au-dessus des barbaries quotidiennes produites par l’égoïsme. Elle coûte au bas mot 80 milliards par an au budget français. Alors ce pognon que Bercy laisse aux fraudeurs, il faut bien le prendre ailleurs, non ?


Illustration: merci au très regretté Charb

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