Nous voilà dans les commémorations. Celle de la plus aberrante boucherie qu'il soit. Macron et ses illustres invités vont nous faire de beaux discours. Auxquels on peut préférer les paroles d'Henri Barbusse dans « Le feu, journal d’une escouade » :
« Plus que les charges qui ressemblent à des revues, plus que les batailles visibles déployées comme des oriflammes, plus même que les corps à corps où l’on se démène en criant, cette guerre, c’est la fatigue épouvantable, surnaturelle, et l’eau jusqu’au ventre, et la boue et l’ordure et l’infâme saleté. C’est les faces moisies et les chairs en loques et les cadavres qui ne ressemblent même plus à des cadavres, surnageant sur la terre vorace. C’est cela, cette monotonie infinie de misères, interrompue par des drames aiguës, c’est cela, et non pas la baïonnette qui étincelle comme de l’argent, ni le chant du coq du clairon au soleil ! »
Pendant la grande boucherie 14-18, les profiteurs et fauteurs de guerre se la faisaient belle. Les grands boulevards de Paris affichaient une vie trépidante ; les théâtres, les brasseries, les cafés concerts, les boites de nuits étaient pleins de fêtards…
Pendant que les Français Schneider, De Wendel et autres faisaient discrètement la bringue avec leurs homologues, rivaux et…amis allemands Krupp, Thyssen et autres fabricants de choses en aciers bien pointues, bien aiguisés, qui entrent dans les viandes, qui labourent les chairs, qui brisent les os, qui éclatent les crânes, qui arrachent les yeux, qui explosent en beaux feux d’artifices de mort, les sans-dents de la France d’en-bas s’étripait avec ceux de l’Allemagne d’en-bas. Pour le plus grand profit des précédents.
La droite la plus bornée, la plus avide, la plus lâche se lâchait, se goinfrait, s’engraissait, se tapissait la tripe de sauces chaudes et onctueuses pendant que les ploucs des campagnes et les manards des villes se faisaient trouer la viande. C’est cette même droite que l’on retrouvera parmi les vichystes, les patrons et les collabos en 40 pendant que les cocos, au coude à coude avec la droite républicaine gaulliste, se battaient. C’est cette même droite sans vergogne, cupide, inculte, avide, pleine de morgue, qui pavane sans vergogne en rêvant de trumpiser le pays.
La guerre est « l’art » de faire s’entretuer des gens pauvres, qui ne se connaissent pas, au profit de gens riches qui, eux, se connaissent… Cette maxime à la véracité sans cesse renouvelée à travers les époques a été superbement illustrée par cette chanson de tonton Brassens qui par la dérision lucide marque le désespoir, la résignation mais aussi la révolte de ceux qu’on envoyait à l’abattoir pour rien, sinon transcender la connerie humaine, seule approche que l’on puisse avoir de l’infini…
Eh oui, la guerre, ça pue le sang, la merde, la peur, la mort...
La guerre, c'est l'ombre omniprésente de la mort. De celle qu'on donne comme de celle qu'on redoute.
La guerre, ça sent la poudre qui excite, mais ça sent surtout la sueur aigre de la trouille, la merde du camarade qui se chie dessus, l'odeur doucereuse et écœurante du cadavre qui gonfle au soleil puis dont le ventre éclate, libérant la tripaille putride où grouillent les vers.
La guerre, c'est le désespoir du camarade touché et qui attend des secours qui ne peuvent venir.
La guerre, c'est l'égoïsme salvateur, primordial qui vous fait penser - lorsque votre voisin d'attaque tombe à côté de vous, haché par une rafale ou la tête explosée par une roquette – qui vous fait crier dans votre pauvre tronche: « ouf, c'est lui, c'est pas moi! »
La guerre, ce sont les cris de douleur du camarade touché, les hurlements et les sanglots, les aboiements somme toute rassurants de la vieille bête d'adjudant qui hurle ses ordres.
La guerre, l'embuscade, c'est le corps qui s'efforce de se rétrécir au delà du possible, qui voudrait s'infiltrer dans le plus petit interstice, qui voudrait se fondre dans la boue de la tranchée, la caillasse du djebel ou la vase de la rizière.
La guerre, ce sont les ongles qui se crispent sur la terre à chaque rafale qui vous cherche, qui va vous trouver. C'est la haine de l'autre, de celui qui veut votre peau. C'est le doigt qui ne relâche plus la détente de votre fusil dérisoire.
La guerre, c'est de la merde.
La Paix, petit, c'est une belle garce que l'on la cherche. Toujours. Mais qu'elle est belle ! Et précieuse...
https://www.youtube.com/watch?v=l2F5qaHzkj0
Et après tonton Georges, allez voir ça :
https://www.youtube.com/watch?v=lIRAnmsk_cc
Illustration: merci à Kroll
Commentaires
Bonjour Victor, que dire ? Je voudrais que ce genre de texte n'existe pas... seulement voilà, c'est la vérité que l'on reçoit en pleine face. Aujourd'hui, je me suis contenté de publier un extrait de "Voyage au bout de la nuit" de Céline. Mais demain, je vais partager ton article qui m'a laissé les larmes aux yeux... Amitié...
A ton aise et merci, ami de l'autre bout du monde.
je vous cite " ... C’est cette même droite sans vergogne, cupide, inculte, avide, pleine de morgue, qui pavane sans vergogne en rêvant de trumpiser le pays. "...
> vous oubliez que le parti majoritaire de ce qu'on appelait autrefois la gauche, à savoir le parti socialiste, qui, au pouvoir, a fait exactement la même politique que Sarkozy ou celle que fait actuellement le banquier centriste Macron...
> ce sont les députés et sénateurs du parti socialiste qui ont continué -de 2012 à 2017 - de voter une partie de toutes les lois qui détruisent depuis 20 ans à petit feu la société et le peuple français.
Le parti socialiste type Hollande et consort , c'est la droite que je sache!